29 mars 2007
BNF : un fond pour les auteurs de SFF
Le conservateur de la Bibliothèque Nationale de France (Département des Manuscrits, Catalogue français) est passé voir certains auteurs au Salon du Livre de Paris, ce weekend, et nous a demandé de lui fournir nos documents personnels (manuscrits, carnets etc..)
cool, non ?
ça va faire de la place dans ma cave !
c'est vrai que c'est une bonne idée de nous le demander de notre vivant avant que tout cela soit dispersé ou détruit, d'autant que nous sommes sans doute la dernière génération à travailler sur papier (les modifs, biffages, flèches, ratures etc.. manuscrites).
ainsi donc, dans quelques mois, des inconnus pourront entrer dans mon intimité d'auteur et mesurer le chemin (tortueux) parcouru...
Quel honneur et quel plaisir inavouable de savoir que ces documents (et Dieu sait que j'en ai des cartons pleins, moi qui ne jette rien) seront à l'abri, et accessibles à tous.
J'ignore si des gens les consulteront un jour, mais au moins ils seront plus à leur place là que dans ma cave ou le grenier paternel !
28 mars 2007
Autosatisfaction
Ouf !
Je n'ai plus que 50 000 signes à écrire avant de boucler le premier jet de mon roman maya... Un marathon de 6 mois riche en expériences et en plaisirs nouveaux, en regard du temps que m'ont pris chacun de mes 4 précédents romans.
Bien sûr, me dira-t-on, celui-ci est beaucoup plus court, et moins complexe.
Mais c'est qu'il est bien plus difficile de simplifier son écriture et la structure d'un roman prenant qu'on le croit...
Je reparlerai de cette aventure de plume à la sortie du roman. J'ai beaucoup appris ces derniers mois, et je vais sans doute apprendre encore davantage cet été quand j'en serai aux corrections.
En tout cas, je suis fière de moi... et je n'ai plus qu'à croiser les doigts pour que la copie que je vais rendre soit à la hauteur ! hi hi hi !
Bon, c'est pas tout ça, mais ils ne vont pas s'écrire tout seuls, ces 50 000 signes ! encore un mois de boulot en perspective.
20 mars 2007
SALON DU LIVRE DE PARIS + interview du mois
RAPPEL : je serai en dédicace au salon du livre de Paris, Porte de Versailles, stand A160 (éd. nestiveqnen) vendredi 23, samedi 24 et dimanche 25 mars toute la journée.
horaire officiel des dédicaces : 16h-17h
INTERVIEW PARUE DANS GEANTE ROUGE N°6 (mars 2007) :
EK : Bonjour, Claire Panier-Alix, alors, qu’est-ce que ça fait de débarquer dans un fanzine qui d’habitude se cantonne à la SF ?
CPA : Toute intimidée (rire). Et toi, qu'est-ce que ça te fait d'y introduire de la fantasy ?
EK : Note bien que l’univers que tu développes dans le Sang d’Irah n’est pas vraiment uniquement de fantasy, puisqu’il y a cette faille jaune qui le relie à la Terre du début du XVIIème siècle… C’est un peu SF, ça… On s’encanaille ?
CPA : En fait ce roman se déroulant chronologiquement avant la trilogie "La Chronique Insulaire", c'est plutôt soft, de ce côté-là. L'aspect "fantastique" et transgenre est beaucoup plus développé dans "La clef des mondes" (le bien nommé) et balaye complètement la fantasy dans "Le roi repenti" (où je me suis amusée avec mes dadas fortéens en jouant sur les chutes de mannes, le continent aérien cher à Charles Fort, Génésistrine, les îles aériennes à vapeur (assez SF, mais c'est parce que j'aime tant Maurice Renard), un monde insectoïde, toutes sortes de passages de portes (ah ! PJ Farmer !) et j'en passe... Pour écrire Sang d'Irah, il m'a fallu revenir en amont de tout cela, sur une terre de légende plus "arthurienne" et héroic fantasy, la magie de la high fantasy ayant plus sa place dans l'Echiquier d'Einär. Bref, je ne m'encanaille pas, mais je m'efforce d'encanailler le lectorat de fantasy actuel que je trouve un peu bridé par ce qu'on lui donne à manger... Sans doute est-ce dans Sang d'Irah que cet aspect de mon travail est le moins évident, justement parce qu'il s'agit d'une préquelle, mais je n'ai pu m'empêcher de semer quelques cailloux blancs pour ceux qui avaient lu la trilogie. La faille spatio-temporelle à laquelle tu fais référence, et qui me permet d'introduire un pirate du 17e siècle dans mon petit univers légendaire, est de ceux-là. Ensuite, tout est question de point de vue, littérairement parlant : du point de vue de mes personnages, il y a beaucoup de fantastique (intrusion d'anormal dans leur réalité), comme les trolls frappés de lycanthropie par exemple...
EK : Revenons à ton univers, cette île de Nopalep. J’ai une théorie : Nopalep, ça me fait furieusement penser à l’île de Peter Pan avec un Peter qui se ferait appeler Nicolas et incarnerait en même temps le capitaine Crochet, une fée clochette qui serait un peu reine, etc. Qu’est-ce que tu fais ? Tu me flingues tout de suite, ou plus tard ?
CPA : Ma foi pourquoi pas ? Mais dans ce cas, Peter et Clochette ce seraient moi, dans ma démarche d'écriture... Toutefois, je préférerais que tu évoques Munschausen, ou Swift, tu serais plus juste... J'ai conçu Nopalep'am Brode il y a bien longtemps, et cette île-continent rassemble quatre de mes passions d'enfance, de façon très schématique. Au nord, la Scandinavie; Au sud, l'Egypte-Yucatan; Au coeur, un royaume de high fantasy à l'ouest, et la terre d'Irah, toute arthurienne, à l'est...
EK : Encore un mot sur Irah. Le personnage de Maryannor est très complexe, très fouillé, très attachant, très femme, en fait. Par contraste, les héros masculins seraient un peu plus monolithiques. Ou alors, c’est comme ça dans la vraie vie ?
CPA : Ce serait si facile de dire que je manie mieux ce que je connais de l'intérieur... Mais comme je l'ai déjà dit, ce roman, s'il s'inscrit comme le premier de la série chronologiquement, est le quatrième dans l'ordre d'écriture. Dans les trois précédents, il n'y avait pour ainsi dire pas de personnage féminin. Dans sang d'Irah, j'ai voulu montrer un personnage qui n'était pas une potiche ni un stéréotype, mais un être humain à part entière, avec ses ambivalences, ses ratages, ses raisons, un personnage qui évolue, comme je l'avais fait jusque là avec mes (anti-)héros. Pour ce qui est des hommes, dans ce roman, ils ne sont pas monolithiques. Pas tous. Cela dépend un peu de leur monde et de ce qu'il représente sur la carte. L'Homme-Dieu d'Orkaz l'est très certainement, encore qu'il ait bien du mal à se débarrasser de son humanité pour assumer son rôle de dieu-incarné sans faille. Quant à Duncan d'Irah, j'espère bien qu'il l'est, droit dans ses bottes, trop même, car c'est ce qui le définit et le rend attachant. Comment se débrouiller, quand on est un héros de légende, mais qu'on est entouré par des êtres faillibles, veules, sur qui on ne peut pas compter, des êtres humains, quoi ? Duncan était l'un des personnages principaux de la Chronique Insulaire, mais il était mort, un reflet de la légende qu'il avait laissé derrière lui. Les lecteurs l'ont adoré et voulaient savoir ce qu'il avait vécu avant de se retrouver sur l'échiquier d'Einär... J'espère ne pas avoir trop abîmé leur chéri... C'est confortable de se glisser dans les bottes d'un héros sans peur et sans reproche, mais j'ai voulu montrer que ces qualités héroïques n'étaient pas toujours si faciles à vivre, et qu'elles ne faisaient se pamer que les midinettes. Une fois que celles-ci sont devenues des femmes, comme c'est le cas de Maryanor, il leur faut un peu plus qu'une peinture préraphaélite pour les exciter... Et je pense que le lectorat de fantasy à besoin de textes un peu étoffés, dans le fond comme dans la forme, une fois passé la puberté... Ou plutôt (car il faut peut-être nuancer un peu) qu'il ne faut pas négliger le lectorat adulte. Souvent, de nos jours, on fait comme si les lecteurs de fantasy n'existaient qu'entre 13 et disons 25 ans, qu'il recherchait uniquement du divertissement pré-mâché, et qu'il ne fallait surtout pas espérer ramener (je dis bien : ramener, rendre à César !) ce genre premier dans le giron de la littérature. Tu vois ça, le bon vieux schisme entre littérature avec un grand L et roman populaire... Mais je m'égare.
EK : Parlons de toi, maintenant. Cette envie de créer des mondes, foisonnants comme ceux que tu nous offres, ça remonte à quand ?
CPA : Je ne me suis jamais trouvée à mon aise "ici et maintenant". J'ai adoré Stevenson et Jack London quand j'étais petite, puis je suis tombée dans Tolkien et dans Farmer, Moorcock et je te fais grâce de la liste : on a tous à peu près la même... Pendant mes études, j'ai été amenée à m'interroger sur la démarche créatrice des auteurs qui me fascinaient. Et, de fil en aiguille, la mienne est née...
EK : Mais il y a bien un jour où les choses ont basculé, où tu t’es mise à y croire ?
CPA : A croire en quoi ? à l'extrême jouissance qu'il y a à voyager dans son propre inconscient, dans son patrimoine culturel, dans son imaginaire ? à la frustration permanente que cela génère ? à la magie de la découverte ("c'est moi k'a fé ça ?")... ? Je ne crois qu'à une seule vérité : demain est un autre jour, laisse venir...
EK : Et la petite Claire, qu’est-ce qu’elle lisait, qu’est-ce qu’elle regardait à la télé, au cinéma ?
CPA : Le Muppet Show, L'île aux Enfants, Candy, tous les films de cape & épée possibles, les mohicans de paris, vidock, le prisonnier, Temps X, Excalibur, Conan, la Planète Interdite (mon film culte depuis toujours), les mines du roi Salomon (avec Stewart Granger, mon second film culte) etc.. Côté lecture, j'ai déjà évoqué ci-dessus quelques pistes. Je suis assez classique, j'adore Gustav Meyrinck, Potocki, Renard, Dumas, Farmer, Herbert, K Dick, Shakespeare, Tolkien, Gaston Leroux, Cervantès, Giraudoux, Anouilh, Homère, E.R. Burroughs, Howard (sans Sprague et en vo), Leiber, LeGuinn, Melville, l'Arioste, Virgile, Kippling... Bref, j'ai toujours été ecclectique, pourvu que ce soit bon.
EK : Ecrire, c’est toujours un peu technique, aussi. Alors, dis-nous tout : as-tu des manies, des horaires, des lieux, fais-tu un plan, écris-tu à la main, ou sur clavier, tout, quoi, on veut tout savoir !
CPA : J'écris toutes les nuits, de 23h à 2 ou 3h, sur mon fidèle ibook, et je corrige dans la journée sur papier. Je saisis les modifs le soir et rebelotte. Mes manuscrits sont des millefeuilles que je repasse sans arrêt jusqu'à ce que mon éditeur me l'arrache. Je n'écris jamais quand je suis en congé (je suis bien incapable de dire pourquoi) par contre je passe un temps fou à relire, à remanier, à biffer, à corriger, à reprendre, à gonfler... Je ne suis jamais un plan écrit, par contre j'ai tout en tête, une espèce de trame en plusieurs dimensions, avec les implications, la ligne directrice etc.. A partir de là, je laisse l'écheveau se dérouler, et je vérifie en permanence sa cohérence. Je suis depuis toujours une inconditionnelle des dictionnaires (synonymes, analogies...), mais actuellement ce qui me prend le plus de temps c'est l'évaluation de la mise en scène, la façon d'amener les choses. j'ai beaucoup simplifié mon style, et suis une adepte du "montrer vaut mieux que dire", bien que je sois irrémédiablement bavarde à cause d'un traumatisme remontant à mon enfance en tolkiennerie (comment faire quand on est imprégnée par la réfléxion du vieux et brave professeur d'Oxford concernant la vie, le non dit qui interpelle le lecteur quand on évoque une forêt ou une montagne au loin où il doit bien se passer quelque chose, aussi... ?)
EK : Pour la convention de Bellaing, tu as donné à Pierre Gévart une nouvelle qui parvient à marier au moins trois genres. Est-ce que, dans tes cartons ou dans tes projets il y a quelque chose comme cela, loin de Nopalep ?
CPA : Comme je l'ai dit plus haut, c'est une de mes manies. Je n'y pense pas, mais je ne peux pas m'en empêcher. Mon univers personnel n'est pas fait que de tel ou tel genre ou influence, pas plus que mes goûts ou mes aspirations. Je ne m'interdis rien, je laisse venir, et si ça tient la route c'est que cela devait être. Vive la diversité, l'originalité, le dépaysement, le plaisir... Et c'est une gageure quand on est étiquetée "fantasy", parce que pour moi, cela veut dire "tous azimuts", et surtout ailleurs que sur les terres d'un autre. La fantasy, c'est du fantasme, de la mythologie moderne, et je ne me sens pas l'âme d'un coucou. J'ai un projet en cours où il sera question dans le même espace-temps du Paris du 19e s, de l'âge de bronze, de polar, de fantasy, de fantastique, de steampunk et peut-être un peu de SF si on me cherche trop de ce côté (rire). Je ne me sens pas concernée par les sempiternels débats sur les étiquettes, les définitions, les boîtes. Ou plutôt je ne voudrais pas l'être. J'ai la chance d'avoir un éditeur courageux et ouvert d'esprit, reste à espérer que les libraires et chefs de rayon, pour ne parler que d'eux, retrouveront rapidement leurs esprits et donneront une chance aux lecteurs de pouvoir faire leurs propres choix...
EK : Et pour toi, c’est quoi, la différence entre la SF et la fantasy ?
CPA : Je passe.
EK : C’est vrai que c’est un peu vain de chercher des classifications, de mettre des barrières. Et toi, tu te sens bien avec les gens de la SF aussi. Alors, dis-moi, sur l’île déserte (non, pas Nopalep ! Déserte, j’ai dit), tu emportes dix livres : lesquels ?
CPA : Dix, c'est vraiment pas beaucoup si elle est déserte, ton île, dis !
Le Golem, de Meyrinck
Bran Mak Morn, de Howard
Don Quijotte, de Cervantès
Le manuscrit trouvé à Saragosse, de Potocki
L'intégrale de Shakespeare chez Bouquins
L'intégrale des Sherlock Holmes, d'A. Conan Doyle
Le seigneur des anneaux, de Tolkien,
Le livre des Damnés, de Charles fort
l'Eneïde, de Virgile,
l'intégrale des faiseurs d'univers, de Farmer (je triche, je sais, mais je l'aime tellement, mon Farmer)
EK : Et la question rituelle : dans l’expression "Le XXIème siècle sera… ou ne sera pas", par quel mot tu remplaces les tirets ?
CPA : Euh... Etant donné qu'il est déjà un peu entamé, je ne sais que dire. Bon, on va faire comme si on n'avait rien vu, et comme je suis une casse-pieds je t'en propose deux :
"long" ou "utopique".
horaire officiel des dédicaces : 16h-17h
INTERVIEW PARUE DANS GEANTE ROUGE N°6 (mars 2007) :
EK : Bonjour, Claire Panier-Alix, alors, qu’est-ce que ça fait de débarquer dans un fanzine qui d’habitude se cantonne à la SF ?
CPA : Toute intimidée (rire). Et toi, qu'est-ce que ça te fait d'y introduire de la fantasy ?
EK : Note bien que l’univers que tu développes dans le Sang d’Irah n’est pas vraiment uniquement de fantasy, puisqu’il y a cette faille jaune qui le relie à la Terre du début du XVIIème siècle… C’est un peu SF, ça… On s’encanaille ?
CPA : En fait ce roman se déroulant chronologiquement avant la trilogie "La Chronique Insulaire", c'est plutôt soft, de ce côté-là. L'aspect "fantastique" et transgenre est beaucoup plus développé dans "La clef des mondes" (le bien nommé) et balaye complètement la fantasy dans "Le roi repenti" (où je me suis amusée avec mes dadas fortéens en jouant sur les chutes de mannes, le continent aérien cher à Charles Fort, Génésistrine, les îles aériennes à vapeur (assez SF, mais c'est parce que j'aime tant Maurice Renard), un monde insectoïde, toutes sortes de passages de portes (ah ! PJ Farmer !) et j'en passe... Pour écrire Sang d'Irah, il m'a fallu revenir en amont de tout cela, sur une terre de légende plus "arthurienne" et héroic fantasy, la magie de la high fantasy ayant plus sa place dans l'Echiquier d'Einär. Bref, je ne m'encanaille pas, mais je m'efforce d'encanailler le lectorat de fantasy actuel que je trouve un peu bridé par ce qu'on lui donne à manger... Sans doute est-ce dans Sang d'Irah que cet aspect de mon travail est le moins évident, justement parce qu'il s'agit d'une préquelle, mais je n'ai pu m'empêcher de semer quelques cailloux blancs pour ceux qui avaient lu la trilogie. La faille spatio-temporelle à laquelle tu fais référence, et qui me permet d'introduire un pirate du 17e siècle dans mon petit univers légendaire, est de ceux-là. Ensuite, tout est question de point de vue, littérairement parlant : du point de vue de mes personnages, il y a beaucoup de fantastique (intrusion d'anormal dans leur réalité), comme les trolls frappés de lycanthropie par exemple...
EK : Revenons à ton univers, cette île de Nopalep. J’ai une théorie : Nopalep, ça me fait furieusement penser à l’île de Peter Pan avec un Peter qui se ferait appeler Nicolas et incarnerait en même temps le capitaine Crochet, une fée clochette qui serait un peu reine, etc. Qu’est-ce que tu fais ? Tu me flingues tout de suite, ou plus tard ?
CPA : Ma foi pourquoi pas ? Mais dans ce cas, Peter et Clochette ce seraient moi, dans ma démarche d'écriture... Toutefois, je préférerais que tu évoques Munschausen, ou Swift, tu serais plus juste... J'ai conçu Nopalep'am Brode il y a bien longtemps, et cette île-continent rassemble quatre de mes passions d'enfance, de façon très schématique. Au nord, la Scandinavie; Au sud, l'Egypte-Yucatan; Au coeur, un royaume de high fantasy à l'ouest, et la terre d'Irah, toute arthurienne, à l'est...
EK : Encore un mot sur Irah. Le personnage de Maryannor est très complexe, très fouillé, très attachant, très femme, en fait. Par contraste, les héros masculins seraient un peu plus monolithiques. Ou alors, c’est comme ça dans la vraie vie ?
CPA : Ce serait si facile de dire que je manie mieux ce que je connais de l'intérieur... Mais comme je l'ai déjà dit, ce roman, s'il s'inscrit comme le premier de la série chronologiquement, est le quatrième dans l'ordre d'écriture. Dans les trois précédents, il n'y avait pour ainsi dire pas de personnage féminin. Dans sang d'Irah, j'ai voulu montrer un personnage qui n'était pas une potiche ni un stéréotype, mais un être humain à part entière, avec ses ambivalences, ses ratages, ses raisons, un personnage qui évolue, comme je l'avais fait jusque là avec mes (anti-)héros. Pour ce qui est des hommes, dans ce roman, ils ne sont pas monolithiques. Pas tous. Cela dépend un peu de leur monde et de ce qu'il représente sur la carte. L'Homme-Dieu d'Orkaz l'est très certainement, encore qu'il ait bien du mal à se débarrasser de son humanité pour assumer son rôle de dieu-incarné sans faille. Quant à Duncan d'Irah, j'espère bien qu'il l'est, droit dans ses bottes, trop même, car c'est ce qui le définit et le rend attachant. Comment se débrouiller, quand on est un héros de légende, mais qu'on est entouré par des êtres faillibles, veules, sur qui on ne peut pas compter, des êtres humains, quoi ? Duncan était l'un des personnages principaux de la Chronique Insulaire, mais il était mort, un reflet de la légende qu'il avait laissé derrière lui. Les lecteurs l'ont adoré et voulaient savoir ce qu'il avait vécu avant de se retrouver sur l'échiquier d'Einär... J'espère ne pas avoir trop abîmé leur chéri... C'est confortable de se glisser dans les bottes d'un héros sans peur et sans reproche, mais j'ai voulu montrer que ces qualités héroïques n'étaient pas toujours si faciles à vivre, et qu'elles ne faisaient se pamer que les midinettes. Une fois que celles-ci sont devenues des femmes, comme c'est le cas de Maryanor, il leur faut un peu plus qu'une peinture préraphaélite pour les exciter... Et je pense que le lectorat de fantasy à besoin de textes un peu étoffés, dans le fond comme dans la forme, une fois passé la puberté... Ou plutôt (car il faut peut-être nuancer un peu) qu'il ne faut pas négliger le lectorat adulte. Souvent, de nos jours, on fait comme si les lecteurs de fantasy n'existaient qu'entre 13 et disons 25 ans, qu'il recherchait uniquement du divertissement pré-mâché, et qu'il ne fallait surtout pas espérer ramener (je dis bien : ramener, rendre à César !) ce genre premier dans le giron de la littérature. Tu vois ça, le bon vieux schisme entre littérature avec un grand L et roman populaire... Mais je m'égare.
EK : Parlons de toi, maintenant. Cette envie de créer des mondes, foisonnants comme ceux que tu nous offres, ça remonte à quand ?
CPA : Je ne me suis jamais trouvée à mon aise "ici et maintenant". J'ai adoré Stevenson et Jack London quand j'étais petite, puis je suis tombée dans Tolkien et dans Farmer, Moorcock et je te fais grâce de la liste : on a tous à peu près la même... Pendant mes études, j'ai été amenée à m'interroger sur la démarche créatrice des auteurs qui me fascinaient. Et, de fil en aiguille, la mienne est née...
EK : Mais il y a bien un jour où les choses ont basculé, où tu t’es mise à y croire ?
CPA : A croire en quoi ? à l'extrême jouissance qu'il y a à voyager dans son propre inconscient, dans son patrimoine culturel, dans son imaginaire ? à la frustration permanente que cela génère ? à la magie de la découverte ("c'est moi k'a fé ça ?")... ? Je ne crois qu'à une seule vérité : demain est un autre jour, laisse venir...
EK : Et la petite Claire, qu’est-ce qu’elle lisait, qu’est-ce qu’elle regardait à la télé, au cinéma ?
CPA : Le Muppet Show, L'île aux Enfants, Candy, tous les films de cape & épée possibles, les mohicans de paris, vidock, le prisonnier, Temps X, Excalibur, Conan, la Planète Interdite (mon film culte depuis toujours), les mines du roi Salomon (avec Stewart Granger, mon second film culte) etc.. Côté lecture, j'ai déjà évoqué ci-dessus quelques pistes. Je suis assez classique, j'adore Gustav Meyrinck, Potocki, Renard, Dumas, Farmer, Herbert, K Dick, Shakespeare, Tolkien, Gaston Leroux, Cervantès, Giraudoux, Anouilh, Homère, E.R. Burroughs, Howard (sans Sprague et en vo), Leiber, LeGuinn, Melville, l'Arioste, Virgile, Kippling... Bref, j'ai toujours été ecclectique, pourvu que ce soit bon.
EK : Ecrire, c’est toujours un peu technique, aussi. Alors, dis-nous tout : as-tu des manies, des horaires, des lieux, fais-tu un plan, écris-tu à la main, ou sur clavier, tout, quoi, on veut tout savoir !
CPA : J'écris toutes les nuits, de 23h à 2 ou 3h, sur mon fidèle ibook, et je corrige dans la journée sur papier. Je saisis les modifs le soir et rebelotte. Mes manuscrits sont des millefeuilles que je repasse sans arrêt jusqu'à ce que mon éditeur me l'arrache. Je n'écris jamais quand je suis en congé (je suis bien incapable de dire pourquoi) par contre je passe un temps fou à relire, à remanier, à biffer, à corriger, à reprendre, à gonfler... Je ne suis jamais un plan écrit, par contre j'ai tout en tête, une espèce de trame en plusieurs dimensions, avec les implications, la ligne directrice etc.. A partir de là, je laisse l'écheveau se dérouler, et je vérifie en permanence sa cohérence. Je suis depuis toujours une inconditionnelle des dictionnaires (synonymes, analogies...), mais actuellement ce qui me prend le plus de temps c'est l'évaluation de la mise en scène, la façon d'amener les choses. j'ai beaucoup simplifié mon style, et suis une adepte du "montrer vaut mieux que dire", bien que je sois irrémédiablement bavarde à cause d'un traumatisme remontant à mon enfance en tolkiennerie (comment faire quand on est imprégnée par la réfléxion du vieux et brave professeur d'Oxford concernant la vie, le non dit qui interpelle le lecteur quand on évoque une forêt ou une montagne au loin où il doit bien se passer quelque chose, aussi... ?)
EK : Pour la convention de Bellaing, tu as donné à Pierre Gévart une nouvelle qui parvient à marier au moins trois genres. Est-ce que, dans tes cartons ou dans tes projets il y a quelque chose comme cela, loin de Nopalep ?
CPA : Comme je l'ai dit plus haut, c'est une de mes manies. Je n'y pense pas, mais je ne peux pas m'en empêcher. Mon univers personnel n'est pas fait que de tel ou tel genre ou influence, pas plus que mes goûts ou mes aspirations. Je ne m'interdis rien, je laisse venir, et si ça tient la route c'est que cela devait être. Vive la diversité, l'originalité, le dépaysement, le plaisir... Et c'est une gageure quand on est étiquetée "fantasy", parce que pour moi, cela veut dire "tous azimuts", et surtout ailleurs que sur les terres d'un autre. La fantasy, c'est du fantasme, de la mythologie moderne, et je ne me sens pas l'âme d'un coucou. J'ai un projet en cours où il sera question dans le même espace-temps du Paris du 19e s, de l'âge de bronze, de polar, de fantasy, de fantastique, de steampunk et peut-être un peu de SF si on me cherche trop de ce côté (rire). Je ne me sens pas concernée par les sempiternels débats sur les étiquettes, les définitions, les boîtes. Ou plutôt je ne voudrais pas l'être. J'ai la chance d'avoir un éditeur courageux et ouvert d'esprit, reste à espérer que les libraires et chefs de rayon, pour ne parler que d'eux, retrouveront rapidement leurs esprits et donneront une chance aux lecteurs de pouvoir faire leurs propres choix...
EK : Et pour toi, c’est quoi, la différence entre la SF et la fantasy ?
CPA : Je passe.
EK : C’est vrai que c’est un peu vain de chercher des classifications, de mettre des barrières. Et toi, tu te sens bien avec les gens de la SF aussi. Alors, dis-moi, sur l’île déserte (non, pas Nopalep ! Déserte, j’ai dit), tu emportes dix livres : lesquels ?
CPA : Dix, c'est vraiment pas beaucoup si elle est déserte, ton île, dis !
Le Golem, de Meyrinck
Bran Mak Morn, de Howard
Don Quijotte, de Cervantès
Le manuscrit trouvé à Saragosse, de Potocki
L'intégrale de Shakespeare chez Bouquins
L'intégrale des Sherlock Holmes, d'A. Conan Doyle
Le seigneur des anneaux, de Tolkien,
Le livre des Damnés, de Charles fort
l'Eneïde, de Virgile,
l'intégrale des faiseurs d'univers, de Farmer (je triche, je sais, mais je l'aime tellement, mon Farmer)
EK : Et la question rituelle : dans l’expression "Le XXIème siècle sera… ou ne sera pas", par quel mot tu remplaces les tirets ?
CPA : Euh... Etant donné qu'il est déjà un peu entamé, je ne sais que dire. Bon, on va faire comme si on n'avait rien vu, et comme je suis une casse-pieds je t'en propose deux :
"long" ou "utopique".
18 mars 2007
Compte rendu du Salon du Livre de Mourmelonie
13 mars 2007
Dédicace samedi 17 et dimanche 18 mars
une semaine avant le Salon du Livre de Paris (stand Nestiveqnen A160), je serai en dédicace au Salon du livre de la Mourmelonnie à Dampierre au Temple (51). C'est à côté de Chalons en Champagne.
COMMUNIQUE :
Au programme: exposition d'illustrations originales de Caza, exposition thématique (les sorcières, les monstres), un stand libraires, un stand éditeurs (dont Nestiveqnen et La Clef d'Argent).
Auteurs présents: Alain Bérard, Alain Grousset, Magdalena Guirao Jullien, Elvire Murail, Marie-Hélène Delval, Nicolas de Hirsching, Philippe Halvick, Claire Panier-Alix.
Illustrateur: José Mendes.
Enlumineuse: Béatrice Van Den Bossche.
Horaires: samedi 17 mars de 14h à 19h, dimanche 18 mars de 10h à 18h. Informations: 03 26 66 57 07.
La « Communauté de Communes de la Région de Mourmelon » organise la troisième édition du « Salon du Livre de la Mourmelonnie » en milieu rural, du jeudi 15 au dimanche 18 mars à la salle polyvalente de Dampierre au Temple.
Cette manifestation est initiée par les élus et acteurs de l’intercommunalité regroupant les 8 communes de Mourmelon le Grand, Mourmelon le Petit, Bouy, Livry Louvercy, Baconnes, Vadenay, Dampierre au temple et Saint Hilaire au Temple.
Un thème différent est développé à chaque nouvelle édition, ce thème sert de fil rouge et de support aux travaux des enfants des écoles, cette année le « fantastique » est à l’honneur.
L’une des particularités de ce salon, qui n’est pas un salon du livre jeunesse, est de s’adresser tout particulièrement aux enfants des écoles en sollicitant des projets et en proposant des stands de présentation de ces projets. En effet, dès la rentrée scolaire de septembre, une malle de livres circule dans chacune des classes des établissements scolaires de la Mourmelonnie pour proposer des auteurs et des livres susceptibles d’impliquer les enseignants et les enfants dans la construction d’un projet. Chaque classe peut également recevoir le soutien d’un auteur, l’aidant ainsi à finaliser ou enrichir le projet de la classe. Enfin, le projet terminé est exposé en bonne place sur le salon du livre. Cette année, sur quarante quatre classes sollicitées, quarante deux souhaitent visiter le salon, et trente et une proposent un projet. La mission des organisateurs est d’imaginer l’accueil et le déplacement de tout ce petit monde à Dampierre au Temple.
L’accueil des écoliers se déroulera les jeudi 15, vendredi 16 et samedi 17 mars matin, aux heures scolaires. _ Le samedi après-midi et la journée du dimanche est réservée à l’accueil du public.
L’entrée est naturellement gratuite
* Contact : Salon du livre de la Mourmelonnie
* Tél : 03 26 66 55 13.
_________________
"La littérature n'est qu'une branche de la littérature fantastique" - (Jorge Luis Borges)
mon site : http://panieralix.free.fr/index.htm
mon blog : http://claire-panier-alix.blogspot.com/
COMMUNIQUE :
Au programme: exposition d'illustrations originales de Caza, exposition thématique (les sorcières, les monstres), un stand libraires, un stand éditeurs (dont Nestiveqnen et La Clef d'Argent).
Auteurs présents: Alain Bérard, Alain Grousset, Magdalena Guirao Jullien, Elvire Murail, Marie-Hélène Delval, Nicolas de Hirsching, Philippe Halvick, Claire Panier-Alix.
Illustrateur: José Mendes.
Enlumineuse: Béatrice Van Den Bossche.
Horaires: samedi 17 mars de 14h à 19h, dimanche 18 mars de 10h à 18h. Informations: 03 26 66 57 07.
La « Communauté de Communes de la Région de Mourmelon » organise la troisième édition du « Salon du Livre de la Mourmelonnie » en milieu rural, du jeudi 15 au dimanche 18 mars à la salle polyvalente de Dampierre au Temple.
Cette manifestation est initiée par les élus et acteurs de l’intercommunalité regroupant les 8 communes de Mourmelon le Grand, Mourmelon le Petit, Bouy, Livry Louvercy, Baconnes, Vadenay, Dampierre au temple et Saint Hilaire au Temple.
Un thème différent est développé à chaque nouvelle édition, ce thème sert de fil rouge et de support aux travaux des enfants des écoles, cette année le « fantastique » est à l’honneur.
L’une des particularités de ce salon, qui n’est pas un salon du livre jeunesse, est de s’adresser tout particulièrement aux enfants des écoles en sollicitant des projets et en proposant des stands de présentation de ces projets. En effet, dès la rentrée scolaire de septembre, une malle de livres circule dans chacune des classes des établissements scolaires de la Mourmelonnie pour proposer des auteurs et des livres susceptibles d’impliquer les enseignants et les enfants dans la construction d’un projet. Chaque classe peut également recevoir le soutien d’un auteur, l’aidant ainsi à finaliser ou enrichir le projet de la classe. Enfin, le projet terminé est exposé en bonne place sur le salon du livre. Cette année, sur quarante quatre classes sollicitées, quarante deux souhaitent visiter le salon, et trente et une proposent un projet. La mission des organisateurs est d’imaginer l’accueil et le déplacement de tout ce petit monde à Dampierre au Temple.
L’accueil des écoliers se déroulera les jeudi 15, vendredi 16 et samedi 17 mars matin, aux heures scolaires. _ Le samedi après-midi et la journée du dimanche est réservée à l’accueil du public.
L’entrée est naturellement gratuite
* Contact : Salon du livre de la Mourmelonnie
* Tél : 03 26 66 55 13.
_________________
"La littérature n'est qu'une branche de la littérature fantastique" - (Jorge Luis Borges)
mon site : http://panieralix.free.fr/index.htm
mon blog : http://claire-panier-alix.blogspot.com/
Citation du jour
L'écriture ressemble à la prostitution. D'abord on écrit pour l'amour de la chose, puis pour quelques amis, et à la fin, pour de l'argent.
Molière
j'ajouterai qu'il est illusoire de dire qu'on écrit pour l'amour de l'art. On le fait pour l'amour, oui, mais pour l'amour après lequel on court, celui qui nous reconnaîtrait malgré les masques et les fards que la société nous impose. On écrit parce qu'on croit qu'on saura exprimer, ou plutôt expulser la chose qui nous étouffe et sur laquelle on n'arrive à coller aucun mot. On écrit parce qu'on espère qu'on nous aimera pour ce que l'on est, pour ce qu'on dévoile de soi par cet exercice périlleux. On écrit parce qu'on est un peu suicidaire, parce qu'on ne peut pas faire autrement. On écrit parce que c'est extrêmement jouissif, par moment, entre deux phases de deuil, de frustration, de doute, de mortification.
l'écriture est une sorte de fuite en avant, de chute constante. Mais quelle chance, par rapport à ceux qui n'ont même pas cet exutoire, ce semblant de sens et de raison d'être !
12 mars 2007
Les secrets bien gardés de Teotihuacán
L'information date un peu, et je n'ai pas réussi à mettre la main sur la publication des résultats de l'expérience, s'ils sont sortis depuis. Toutefois, puisque je suis en train d'écrire sur Teotihuacan, qu'une partie du roman est liée à la caverne et aux tunnels et chambres qui se trouvent dessous, et puisque je reviens du Mexique où l'on explique aux touristes que les pyramides sont pleines, je trouve ce papier trèèèès intéressant. D'une part il confirme qu'elle n'est pas pleine, et que les archéologues ont effectivement trouvé au moins un tunnel, la caverne (avec le cenote) et les chambres, et d'autre part que le lien mystique que j'établis dans le roman (qui reste un roman de fantasy) entre Teotuhuacan et le monde des dieux, mais aussi avec les scientistes atlantes, est vraissemblable... enfin, façon de parler :-)
Courrier International
28/08/2003, Numero 669
Des rayons cosmiques venus du fin fond de l'Univers vont sonder l'intérieur d'une pyramide deux fois millénaire de la "cité des dieux", près de Mexico, à la recherche du mystérieux passé d'une civilisation pré-aztèque.
NEW SCIENTIST
Londres
CONTEXTE
Précédent
Dans les années 60, Luis Alvarez, de l'Université de Californie à Berkeley, avait déjà utilisé un détecteur de rayons cosmiques pour explorer la pyramide de Khephren, située à une dizaine de kilomètres du Caire, en Egypte. En raison d'une des nombreuses guerres qui ont éclaté dans la région, les recherches ne purent être parachevées, mais elles permirent tout de même à Luis Alvarez d'affirmer dans la revue Science qu'il n'avait découvert aucune chambre.
Lorsque Arturo Menchaca était étudiant en physique à l'université d'Oxford, il n'aurait jamais pensé que sa passion pour les particules subatomiques le mènerait à l'archéologie. Dans quelques jours, pourtant, Arturo Menchaca, responsable de l'Institut de physique de l'Université nationale autonome du Mexique (UNAM), fouillera des tonnes de terre et de pierres à la recherche du tombeau d'un roi disparu il y a plusieurs siècles. Pour ce faire, il se servira d'un détecteur de rayons cosmiques, un instrument hors du commun, même à notre époque où l'archéologie fait appel à la haute technologie. Le physicien pense que les particules d'énergie élevée qui bombardent la Terre depuis l'espace permettront de dévoiler les secrets d'un monument vieux de deux mille ans : la pyramide du Soleil de Teotihuacán, près de Mexico.
La cité de Teotihuacán a été fondée en 400 av. J.-C., avec l'arrivée des premiers hommes dans la région. C'était la plus grande métropole des Amériques, la capitale d'une civilisation complexe qui a prospéré bien plus longtemps que la civilisation romaine. Mais c'est à peu près tout ce que nous savons d'elle. Par exemple, nul ne sait si elle était gouvernée par des monarques absolus, comme c'était le cas dans la plupart des cultures antiques, ou si elle était dirigée par une coalition représentant les familles les plus puissantes. Même le nom originel de la cité reste inconnu. Pour des raisons obscures, elle s'est dépeuplée autour du VIIe siècle de notre ère. Plus tard, les Aztèques la découvrirent désertée et en déduisirent que la région était peuplée d'êtres surnaturels. C'est pourquoi ils la nommèrent Teotihuacán, la "cité des dieux" dans leur langue, le nahuatl.
"Malheureusement, Teotihuacán n'a pas d'histoire. Nous ne disposons d'aucune source, orale ou écrite, susceptible de nous aider à comprendre le passé de la cité", regrette Linda Manzanilla, archéologue à l'Institut de recherches anthropologiques de l'UNAM.
L'une des plus grandes questions non élucidées de Teotihuacán concerne ses origines : qui a fondé et dirigé cette cité sacrée ? Les archéologues pensent que la réponse se trouve dans les chambres royales qui sont enfouies sous le site, mais les fouilles entreprises il y a plusieurs dizaines d'années n'ont rien révélé. La réponse viendra-t-elle de l'espace ? C'est ce que pense Arturo Menchaca. Lorsque les rayons cosmiques [un ensemble de particules de haute énergie parcourant l'Univers dans toutes les directions, dont on ne connaît pas la source exacte] pénètrent dans l'atmosphère terrestre, il se produit une collision violente mais invisible qui génère des millions de muons, minuscules particules qui ne vivent qu'un millionième de seconde. Durant ce bref laps de temps, les muons parcourent des dizaines de kilomètres et traversent la plupart des matériaux sans interaction - ou presque. En effet, à chaque obstacle traversé, une infime partie des muons est absorbée. Plus le matériau est dense, plus l'absorption est importante. Installé sous une structure quelconque, comme la pyramide du Soleil, le détecteur de rayons cosmiques permettra de mesurer indirectement la densité de la matière qui se trouve au-dessus. "Si nous détectons plus de particules que prévu en provenance d'une certaine direction, nous pourrons conclure à la présence d'un trou", explique Arturo Menchaca.
Le détecteur ressemble à un cube de 1 mètre de côté. Le dessus et le dessous du cube sont revêtus de scintillateurs qui génèrent un signal électrique et de la lumière quand ils sont percutés par des particules d'énergie élevée. Sachant qu'il faut moins d'une nanoseconde aux muons pour traverser le cube, la présence de muons sera confirmée si les deux couches de scintillateurs émettent un signal dans ce laps de temps. D'après les estimations d'Arturo Menchaca, si la pyramide du Soleil ne recèle pas de compartiments, le détecteur devrait comptabiliser 100 particules par seconde. Si ce chiffre est plus élevé, les chercheurs en déduiront qu'il existe une chambre cachée.
La phase de détection ne représente qu'une partie du travail. Les chercheurs doivent également déterminer de quelle direction proviennent les muons. Pour ce faire, 1 200 fils électriques ont été tendus dans différentes directions à l'intérieur du cube. Quand ils traversent le détecteur, les muons ionisent l'air, provoquant un champ électrique qui altère les courants circulant dans les fils.
Plus les fils sont proches de la trajectoire des muons, plus les effets sont importants. Ainsi, les chercheurs peuvent se fonder sur l'emplacement des courants altérés pour déterminer la trajectoire des muons dans le détecteur et a fortiori dans la pyramide. S'ils remarquent un nombre de muons anormalement important en provenance d'une direction particulière, ils en déduiront qu'ils ont traversé une chambre cachée.
Dernier détail : comment placer le détecteur sous la cité ? Creuser une chambre serait une solution définitive, onéreuse et susceptible de détériorer le patrimoine archéologique. Sur ce point, les chercheurs de Teotihuacán ont eu de la chance. Les premiers habitants de la cité avaient creusé un tunnel qui mène presque au coeur de la pyramide du Soleil. L'entrée est étroite mais le reste de la galerie est très spacieux. Longue de plus de 100 mètres, elle débouche sur une grande caverne qui donne sur plusieurs chambres. "L'endroit se prête parfaitement à notre expérience", se réjouit Arturo Menchaca. L'année dernière, le physicien a installé un prototype du détecteur au beau milieu de la caverne. Après des tests concluants réalisés sur le matériel et les logiciels, lui et ses collègues de l'UNAM ont construit la version finale de la machine.
Dans quelques jours, le détecteur de Teotihuacán sera placé sous la pyramide ; il y restera toute une année pour compter des millions de muons. Des gigaoctets de données seront transférés en continu sur un ordinateur situé 40 kilomètres plus loin, à l'UNAM. Là, les scientifiques décortiqueront les chiffres à la recherche d'une chambre cachée qui pourra être localisée avec une précision de cinquante centimètres. S'ils venaient à trouver une chambre royale, le plus dur resterait à faire : creuser à partir de données obtenues grâce à des rayons cosmiques. Toutefois, compte tenu du fait que les scientifiques connaîtront l'emplacement précis de la chambre, les travaux causeront moins de dégâts qu'une fouille aveugle. Si les scientifiques venaient à localiser une chambre royale, que seraient-ils susceptibles d'y trouver ? De l'or et des émeraudes attestant de la prospérité des anciens rois ? Ou de simples ossements ?
Linda Manzanilla a étudié les nombreuses fresques découvertes à Teotihuacán (aucune d'elles ne représente les monarques) et en a déduit que les habitants de la cité ne glorifiaient pas leurs dirigeants. Elle pense plutôt que le pouvoir était partagé. "L'ensemble de la cité était divisé en quatre grands secteurs. Ce chiffre, quatre, est récurrent dans l'art de Teotihuacán, ainsi que dans la place centrale d'un palais que je fouille actuellement près de la pyramide du Soleil. Tous ces signes laissent penser qu'il existait une coalition politique stable composée de quatre dirigeants", livre-t-elle. Dans un an, nous saurons sans doute, grâce aux rayons cosmiques, si l'hypothèse de Linda Manzanilla est la bonne.
Gonzalo Argandoña
07 mars 2007
05 mars 2007
CENSURE CHEZ MANGO ? DROIT DE REPONSE DE L'EDITEUR
Comme je le signalais dans mon message du 15 février 2007 concernant la pétition "Mango", je suis l'affaire et le droit de réponse de l'éditeur que j'attendais est tombé.
Lorsque j'ai signé la pétition, je nuançais ma position.
voici ce qu'en dit l'éditeur :
La réponse de Mango et Fleurus
Droit de réponse
Monsieur le Directeur de la Publication
J’ai pris connaissance de l’éditorial, du Forum et des différents articles que votre site électronique actusf a consacré au roman de Nathalie Le Gendre intitulé « Les Orphelins de Naja ».
Il me semble que la déontologie du journalisme exige de ne reproduire une information qu’après en avoir vérifié la véracité et de ne relayer une accusation lancée contre une personne, physique ou morale, qu’après avoir permis à cette personne d’exposer son point de vue. Je ne doute pas que sont bien vôtres ces exigences qui sont à la base du respect mutuel qui permet le « vivre ensemble » en démocratie. Je suis donc étonné que vous ayez publié vos communications sans prendre la peine de nous contacter pour connaître notre point de vue. Ce point de vue, il me paraît utile de le faire connaître à vos lecteurs, afin que ce soit librement qu’ils se forgent une opinion.
La collection Autres Mondes, dont nous sommes fiers d’être les Editeurs, est composée de publications destinées à la jeunesse. Au-delà de ses qualités littéraires, le mérite de cette collection est de permettre aux jeunes de réfléchir à des questions de société, à partir d’une histoire passionnante transposée dans le futur.
En tant qu’Editeurs, nous adhérons totalement à ce projet. Cependant, les ouvrages étant publiés sous notre marque, il nous revient de garantir qu’ils conviennent au public visé, tant sur le plan de la forme que du fond. Cette responsabilité est un élément essentiel de la déontologie de notre métier.
De toute façon, si nous jetions aux orties notre déontologie pour ne juger les manuscrits qu’à l’aune de critères commerciaux et financiers, la Loi de la République nous rappellerait aussitôt à nos devoirs. En effet, l’édition des publications destinées à la jeunesse est régie par la loi du 16 juillet 1949, version consolidée au 5 janvier 1988, qui édicte des responsabilités très contraignantes pour les éditeurs : « Les publications visées à l’article 1er [destinées aux enfants et adolescents] ne doivent comporter […] aucune insertion […] de nature à démoraliser l’enfance ou la jeunesse, ou à inspirer ou entretenir des préjugés ethniques » Or, l’on sait qu’aujourd’hui, Convention européenne des Droits de l’Homme aidant, sont assimilés à des préjugés ethniques les préjugés fondés sur l’appartenance ou la non appartenance à une religion. La loi précise par ailleurs : « A l’égard des infractions prévues à l’article 2 de la présente loi, les directeurs ou éditeurs seront, pour le seul fait de la publication, passibles comme auteurs principaux des peines portées à l’article 7. » L’Editeur a donc au premier chef le devoir et la responsabilité de veiller à ce que les publications pour la jeunesse qu’il édite, ou envisage d’éditer, respectent les jeunes lecteurs et les lois qui le défendent.
C’est dans ce contexte déontologique et législatif que le Directeur éditorial de Mango- Jeunesse, M. Christophe Savouré, a indiqué au Directeur de collection, Denis Guiot, qu’il ne publierait pas en l’état le dernier manuscrit de Nathalie Legendre et qu’il souhaitait en discuter avec l’Auteur.
En l’occurrence, c’est une contre-vérité de prétendre que M. Christophe Savouré ait dit que « cet ouvrage ne paraîtrait pas ». Il a dit, en substance, qu’il ne pouvait pas publier cet ouvrage en l’état, mais qu’il souhaitait, avec l’Auteur, débattre des problèmes que lui semblait poser sa publication. La qualité littéraire de l’ouvrage n’est bien-entendu pas en cause. Dans l’absolu, son contenu ne l’est pas non plus. Il est même assez remarquable. Mais le sujet traité, la pédophilie, oblige à s’interroger sur la manière dont l’histoire et ses péripéties vont être reçues par des jeunes « à partir de 11 ans ».
Permettez-moi de m’étonner que, sans avoir lu la moindre ligne de ce livre, vous vous laissiez aller à colporter des jugements aussi gratuitement malveillants sur l’attitude de son Editeur. Je me permets de suppléer succinctement votre ignorance. L’histoire se passe au XXIIIe siècle sur une planète nouvellement colonisée où des enfants « défavorisés » sont « déportés » pour être « rééduqués » sous l’autorité de « l’Eglise » et de « l’Armée ». Finalement, on découvre que « l’Eglise » a mis en place des réseaux pédophiles qui se fournissent en « chair fraîche » dans les orphelinats qu’elle dirige. Sur cette planète dédiée, presque tous sont complices et participants : soeurs, frères, Mère supérieure, prêtres et évêques.
Quel est le problème ? Il a semblé aux responsables éditoriaux que si des adultes ou des grands adolescents étaient capables, grâce à ce beau livre, de réfléchir, sans faire de transpositions abusives, à l’existence bien réelle de la pédophilie dans des institutions comme l’Eglise, il existait des risques que des enfants de 11, 12 ou 13 ans soient conduits à faire des amalgames susceptibles de nourrir chez eux des préjugés simplistes. Le livre se retournerait alors contre son objet qui est d’apprendre aux jeunes à éclairer leur discernement face aux conditionnements que peuvent leur imposer les membres des institutions.
Pour mieux vous faire comprendre notre position, je vais moi aussi faire une transposition. Il y a eu et il y a des enseignants pédophiles. Imaginez qu’un livre propose l’histoire suivante : Au XXIIIe siècle, sur une planète nouvellement colonisée, des enfants sont déportés pour être abusés sexuellement au sein de « l’Education nationale » qui est présentée, en tant qu’institution, comme organisatrice de réseaux pédophiles. Ce livre, aussi remarquable serait-il par ailleurs, le mettriez-vous dans les mains de jeunes de 11, 12 ou 13 ans, sans au moins en avoir débattu auparavant, sans avoir bien pesé le pour et le contre avec l’Auteur ?
Ce livre pose bien d’autres questions, toujours dans la mesure où il entre dans une collections qui s’adresse à des jeunes « à partir de 11 ans ». Le viol d’une jeune fille de 13 ans, par son tuteur, est raconté d’une manière, certes jamais complaisante, mais assez impressionnante et réaliste et, surtout, ce viol peut être compris par de jeunes lecteurs comme une bonne action (il s’agit de mettre la victime enceinte pour lui éviter d’être envoyée dans une maison de passe). L’usage de la drogue, qui est généralisée chez ces millions de malheureux enfants, peut être compris comme le seul moyen d’échapper aux difficultés de l’existence, etc. Bref, ce sont des questions qu’un Editeur responsable doit se poser avec l’Auteur avant de publier un ouvrage pour la jeunesse. Quitte à consulter des spécialistes pour éclairer le discernement.
Pour finir, je me tiens à votre disposition pour commenter toutes les erreurs de fait contenues dans vos communications, afin que vous puissiez informer vos lecteurs en toute connaissance de cause, et non sur les seules allégations de M. Denis Guiot.
Vous êtes responsable d’un organe de presse, vous êtes donc particulièrement sensible à tous les enjeux éthiques de la transmission de l’information. Je veux croire, même si vous ne partagez pas toutes nos raisons, que vous saurez, dans une juste mesure, leur faire droit. Et je ne doute pas que vous aurez l’honnêteté intellectuelle de les diffuser aussi largement que vous avez cru devoir diffuser des « informations », qui, quand on connaît les faits, relèvent de la catégorie des rumeurs tendancieuses.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur de la publication, l’expression de mes sentiments distingués et respectueux.
Pierre-Marie Dumont
Président des Editions Mango
Directeur Général du Groupe Fleurus
P.S. De surcroît, il est apparu à l’Editeur que, tel quel, l’ouvrage pouvait risquer de tomber sous le coup de la Loi. L’article 29 créé par la Loi 1881-07-29 prévoit que : « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication […] de cette allégation ou de cette imputation est punissable même si elle vise une personne ou un corps non expressément nommé, mais dont l’identification est rendue possible par les termes du discours… » L’article 32 ajoute : « La diffamation commise […] envers un groupe de personnes à raison de leur appartenance ou non appartenance à […] une religion sera punie d’un an d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende… »
un droit de réponse un peu menaçant et sur la défensive, mais bon, n'ayant pas lu le roman je suis bien incapable de dire qui est de bonne foi et qui ne l'est pas. Ce que j'aimerais savoir, c'est l'âge réel des lecteurs de la collection Autres Mondes. A ma connaissance, et après en avoir lu quelques uns, bien qu'étiquetée 11 ans, ce serait plutôt les adolescents qui seraient ciblés depuis des années...
Lorsque j'ai signé la pétition, je nuançais ma position.
voici ce qu'en dit l'éditeur :
La réponse de Mango et Fleurus
Droit de réponse
Monsieur le Directeur de la Publication
J’ai pris connaissance de l’éditorial, du Forum et des différents articles que votre site électronique actusf a consacré au roman de Nathalie Le Gendre intitulé « Les Orphelins de Naja ».
Il me semble que la déontologie du journalisme exige de ne reproduire une information qu’après en avoir vérifié la véracité et de ne relayer une accusation lancée contre une personne, physique ou morale, qu’après avoir permis à cette personne d’exposer son point de vue. Je ne doute pas que sont bien vôtres ces exigences qui sont à la base du respect mutuel qui permet le « vivre ensemble » en démocratie. Je suis donc étonné que vous ayez publié vos communications sans prendre la peine de nous contacter pour connaître notre point de vue. Ce point de vue, il me paraît utile de le faire connaître à vos lecteurs, afin que ce soit librement qu’ils se forgent une opinion.
La collection Autres Mondes, dont nous sommes fiers d’être les Editeurs, est composée de publications destinées à la jeunesse. Au-delà de ses qualités littéraires, le mérite de cette collection est de permettre aux jeunes de réfléchir à des questions de société, à partir d’une histoire passionnante transposée dans le futur.
En tant qu’Editeurs, nous adhérons totalement à ce projet. Cependant, les ouvrages étant publiés sous notre marque, il nous revient de garantir qu’ils conviennent au public visé, tant sur le plan de la forme que du fond. Cette responsabilité est un élément essentiel de la déontologie de notre métier.
De toute façon, si nous jetions aux orties notre déontologie pour ne juger les manuscrits qu’à l’aune de critères commerciaux et financiers, la Loi de la République nous rappellerait aussitôt à nos devoirs. En effet, l’édition des publications destinées à la jeunesse est régie par la loi du 16 juillet 1949, version consolidée au 5 janvier 1988, qui édicte des responsabilités très contraignantes pour les éditeurs : « Les publications visées à l’article 1er [destinées aux enfants et adolescents] ne doivent comporter […] aucune insertion […] de nature à démoraliser l’enfance ou la jeunesse, ou à inspirer ou entretenir des préjugés ethniques » Or, l’on sait qu’aujourd’hui, Convention européenne des Droits de l’Homme aidant, sont assimilés à des préjugés ethniques les préjugés fondés sur l’appartenance ou la non appartenance à une religion. La loi précise par ailleurs : « A l’égard des infractions prévues à l’article 2 de la présente loi, les directeurs ou éditeurs seront, pour le seul fait de la publication, passibles comme auteurs principaux des peines portées à l’article 7. » L’Editeur a donc au premier chef le devoir et la responsabilité de veiller à ce que les publications pour la jeunesse qu’il édite, ou envisage d’éditer, respectent les jeunes lecteurs et les lois qui le défendent.
C’est dans ce contexte déontologique et législatif que le Directeur éditorial de Mango- Jeunesse, M. Christophe Savouré, a indiqué au Directeur de collection, Denis Guiot, qu’il ne publierait pas en l’état le dernier manuscrit de Nathalie Legendre et qu’il souhaitait en discuter avec l’Auteur.
En l’occurrence, c’est une contre-vérité de prétendre que M. Christophe Savouré ait dit que « cet ouvrage ne paraîtrait pas ». Il a dit, en substance, qu’il ne pouvait pas publier cet ouvrage en l’état, mais qu’il souhaitait, avec l’Auteur, débattre des problèmes que lui semblait poser sa publication. La qualité littéraire de l’ouvrage n’est bien-entendu pas en cause. Dans l’absolu, son contenu ne l’est pas non plus. Il est même assez remarquable. Mais le sujet traité, la pédophilie, oblige à s’interroger sur la manière dont l’histoire et ses péripéties vont être reçues par des jeunes « à partir de 11 ans ».
Permettez-moi de m’étonner que, sans avoir lu la moindre ligne de ce livre, vous vous laissiez aller à colporter des jugements aussi gratuitement malveillants sur l’attitude de son Editeur. Je me permets de suppléer succinctement votre ignorance. L’histoire se passe au XXIIIe siècle sur une planète nouvellement colonisée où des enfants « défavorisés » sont « déportés » pour être « rééduqués » sous l’autorité de « l’Eglise » et de « l’Armée ». Finalement, on découvre que « l’Eglise » a mis en place des réseaux pédophiles qui se fournissent en « chair fraîche » dans les orphelinats qu’elle dirige. Sur cette planète dédiée, presque tous sont complices et participants : soeurs, frères, Mère supérieure, prêtres et évêques.
Quel est le problème ? Il a semblé aux responsables éditoriaux que si des adultes ou des grands adolescents étaient capables, grâce à ce beau livre, de réfléchir, sans faire de transpositions abusives, à l’existence bien réelle de la pédophilie dans des institutions comme l’Eglise, il existait des risques que des enfants de 11, 12 ou 13 ans soient conduits à faire des amalgames susceptibles de nourrir chez eux des préjugés simplistes. Le livre se retournerait alors contre son objet qui est d’apprendre aux jeunes à éclairer leur discernement face aux conditionnements que peuvent leur imposer les membres des institutions.
Pour mieux vous faire comprendre notre position, je vais moi aussi faire une transposition. Il y a eu et il y a des enseignants pédophiles. Imaginez qu’un livre propose l’histoire suivante : Au XXIIIe siècle, sur une planète nouvellement colonisée, des enfants sont déportés pour être abusés sexuellement au sein de « l’Education nationale » qui est présentée, en tant qu’institution, comme organisatrice de réseaux pédophiles. Ce livre, aussi remarquable serait-il par ailleurs, le mettriez-vous dans les mains de jeunes de 11, 12 ou 13 ans, sans au moins en avoir débattu auparavant, sans avoir bien pesé le pour et le contre avec l’Auteur ?
Ce livre pose bien d’autres questions, toujours dans la mesure où il entre dans une collections qui s’adresse à des jeunes « à partir de 11 ans ». Le viol d’une jeune fille de 13 ans, par son tuteur, est raconté d’une manière, certes jamais complaisante, mais assez impressionnante et réaliste et, surtout, ce viol peut être compris par de jeunes lecteurs comme une bonne action (il s’agit de mettre la victime enceinte pour lui éviter d’être envoyée dans une maison de passe). L’usage de la drogue, qui est généralisée chez ces millions de malheureux enfants, peut être compris comme le seul moyen d’échapper aux difficultés de l’existence, etc. Bref, ce sont des questions qu’un Editeur responsable doit se poser avec l’Auteur avant de publier un ouvrage pour la jeunesse. Quitte à consulter des spécialistes pour éclairer le discernement.
Pour finir, je me tiens à votre disposition pour commenter toutes les erreurs de fait contenues dans vos communications, afin que vous puissiez informer vos lecteurs en toute connaissance de cause, et non sur les seules allégations de M. Denis Guiot.
Vous êtes responsable d’un organe de presse, vous êtes donc particulièrement sensible à tous les enjeux éthiques de la transmission de l’information. Je veux croire, même si vous ne partagez pas toutes nos raisons, que vous saurez, dans une juste mesure, leur faire droit. Et je ne doute pas que vous aurez l’honnêteté intellectuelle de les diffuser aussi largement que vous avez cru devoir diffuser des « informations », qui, quand on connaît les faits, relèvent de la catégorie des rumeurs tendancieuses.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur de la publication, l’expression de mes sentiments distingués et respectueux.
Pierre-Marie Dumont
Président des Editions Mango
Directeur Général du Groupe Fleurus
P.S. De surcroît, il est apparu à l’Editeur que, tel quel, l’ouvrage pouvait risquer de tomber sous le coup de la Loi. L’article 29 créé par la Loi 1881-07-29 prévoit que : « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication […] de cette allégation ou de cette imputation est punissable même si elle vise une personne ou un corps non expressément nommé, mais dont l’identification est rendue possible par les termes du discours… » L’article 32 ajoute : « La diffamation commise […] envers un groupe de personnes à raison de leur appartenance ou non appartenance à […] une religion sera punie d’un an d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende… »
un droit de réponse un peu menaçant et sur la défensive, mais bon, n'ayant pas lu le roman je suis bien incapable de dire qui est de bonne foi et qui ne l'est pas. Ce que j'aimerais savoir, c'est l'âge réel des lecteurs de la collection Autres Mondes. A ma connaissance, et après en avoir lu quelques uns, bien qu'étiquetée 11 ans, ce serait plutôt les adolescents qui seraient ciblés depuis des années...
DEDICACES DE MARS
Ereintée par mon voyage au Mexique (j'en reviens tout juste), je ne serai pas au festival de Chambourcy le weekend prochain, mon planning de mars étant trop chargé (la bête à besoin de récupérer un peu, et un manuscrit à boucler dans les semaines à venir...)
Par contre, je serai Salon du livre de la Mourmelonnie à Dampierre au temple (51) la semaine suivante (17 et 18 mars)
Et bien entendu, au Salon du Livre de Paris, les 23, 24 et 25 mars, stand Nestivequen (A160) toute la journée.
Par contre, je serai Salon du livre de la Mourmelonnie à Dampierre au temple (51) la semaine suivante (17 et 18 mars)
Et bien entendu, au Salon du Livre de Paris, les 23, 24 et 25 mars, stand Nestivequen (A160) toute la journée.
Inscription à :
Articles (Atom)